Réalisme quand tu nous tiens!
Du 5 octobre au 8 novembre, Passion Cinéma présente dix longs-métrages qui se démarquent par leur réalisme, en filmant sans fard le quotidien le plus authentique, en ancrant leur récit fictionnel dans un contexte bien réel, ou en s’inspirant d’incroyables histoires pourtant véridiques. Sans oublier les séances en présence des cinéastes, à l’instar de celles de «Vedette», proposées en collaboration avec Ciné-Doc.
Comme le suggère le titre du premier cycle automnal de Passion Cinéma, le réalisme ne cesse d’infuser le septième art. Les dix films sélectionnés par nos soins en font la preuve, dévidant leurs histoires respectives au plus proche du réel. De fait, ce phénomène qui nous sauve souvent de la bêtise n’est pas nouveau, il est même, sans exagérer, constitutif du cinéma. Dès ses débuts, ce dernier s’est en effet partagé entre engagement (quand on suit le réalisme) et évasion (quand on s’en éloigne), tirant de cette tension ses plus grands chefs-d’œuvre.
MÉLIÈS VERSUS LES LUMIÈRE
Pour Cesare Zavattini, chantre inspiré du néoréalisme italien, le cinéma avait complètement failli à sa mission en choisissant «la voie toute de fantaisie chère à Georges Méliès plus que celle des frères Lumière, semée des épines de la réalité». A l’entendre, le film «devait être considéré comme un moyen de connaissance de l’homme et de la société contemporaine». Dans une conférence tenue en 1949 à Pérouse, le coscénariste du «Voleur de bicyclette» confiait encore qu’il avait «comme rêve de faire un film continu avec quatre-vingt-dix minutes de la vie d’un individu à qui il n’arrivait rien… Plus d’acteurs, plus d’histoire, plus de mise en scène… Bref plus de cinéma, mais l’illusion esthétique parfaite et sans filtre du réel.»
SUSPENSE ONTOLOGIQUE
Aujourd’hui, l’on sait l’impasse que représente ce genre de rêve… La présence brute des choses a besoin de la quête motivée du ou de la cinéaste pour faire sens. Et l’on a pris conscience de la part de fiction que recèle tout documentaire. La geste cinématographique développée par les frères Dardenne en fait l’éclatante démonstration, convoquant tous les artifices du récit pour concrétiser leur point de vue sur le monde avec, à la clef, un suspense digne d’Hitchcock qu’un philosophe pourrait sans doute qualifier d’ontologique. Le cinéaste Léopold Legrand agit de même dans son bouleversant «Le Sixième Enfant», lorsqu’il apparie le mélodrame à une description minutieuse du milieu social où évoluent ses protagonistes… Les Lumière et Méliès réconciliés, pour le meilleur du cinéma!