Las Vegas Parano

de Terry Gilliam |
avec Johnny Depp, Benicio del Toro, Craig Bierko, Tobey Maguire, Michael Lee Gogin, Ellen Barkin, etc.


Contrairement à ce qui s’est écrit un peu partout (mais surtout aux États-Unis), Las Vegas Parano constitue le film le plus intéressant de l’ex-Monty Python Terry Gilliam, dans le sens où, pour la première fois, l’auteur de Brazil filme tête baissée, en s’efforçant simplement de trouver le meilleur équivalent visuel (et sonore) de l’univers de défonce si typique des années septante. De fait, il s’agit d’une adaptation de l’autobiographie culte et déguisée d’Hunter S. Thompson, inventeur d’un nouveau type de journalisme (dit «gonzo») qui se moque de la pseudo-objectivité journalistique en privilégiant de façon provocante les états d’âme et les délires personnalisés — d’où un recours massif et «professionnel» à la dope généralisée qui rend ses «reportages» plutôt très subjectifs! Dans le rôle de Raoul Duke, alias le mythique Dr. Gonzo, Johnny Depp parachève sa déconstruction géniale de la figure du «jeune premier», en donnant naissance à un être improbable, à la fois proche du «cartoon» et du «slapstick» du cinéma muet, réplique actualisée d’un Buster Keaton qui serait en permanence sous «speed»! Pour interpréter ce personnage immergé dans un univers de défonce, Depp «défigure» littéralement sa «petite gueule d’ange» en modifiant sa manière de parler, de bouger, jusqu’à transformer son apparence physique pour mieux ressembler à son vieux pote Hunter S. Thompson — dont l’acteur est réellement un ami proche. Ajoutez à cette performance vraiment sidérante la prodigieuse inventivité visuelle de Gilliam et vous obtiendrez l’un des films les plus injustement sous-estimé de la décennie!
FEAR AND LOATHING IN LAS VEGAS, 1998, USA, couleur, 1h58, programme n°83